J’ai failli aller en prison à cause de mon association avec un escroc

J’ai failli aller en prison à cause de mon association avec un escroc

J'ai vécu une aventure que je qualifierais de très risquée et j'ai frôlé la prison à cause de mon association avec un escroc.


Tout commence il y a environ un an, j'ai décidé de lancer un projet en m'associant avec un individu que l'un des locataires d'un espace de coworking que je fréquentais m'avait présenté. Cet escroc, que je vais appeler João (nom fictif), s'est présenté à moi comme un entrepreneur de renom de la région de Lausanne, ayant réalisé plusieurs projets couronnés de succès. Il se vantait sans cesse de ses voitures de luxe et de sa richesse accumulée depuis ses débuts dans l'entrepreneuriat à l'âge de 16 ans. Pour le visualiser, imaginez le cliché de ce gars sur Instagram qui étale sa fortune et propose une formation pour devenir riche comme lui en seulement 48 heures 😆. J'ai découvert plus tard qu'il était en réalité lourdement endetté, poursuivi en justice par plusieurs associés et clients qu'il a volés. Évidemment, il ne possédait aucune de ces voitures de luxe dont il se vantait. Il roulait même à pied, sans le sou.


Dès le début de notre collaboration, j'ai remarqué quelques incohérences dans son comportement, mais à l'époque, j'étais probablement aveuglé par son discours et touché par son histoire familiale (c'était ma propre projection sur lui). J'ai décidé de ne pas m'attarder sur ces détails... quelle erreur monumentale !


Quelques mois après le lancement du projet, João a décidé de réaliser une manipulation financière légale, mais peu orthodoxe pour permettre à la société de conserver ses liquidés. Sans entrer dans les détails de cette manipulation, il devait temporairement retirer de l'argent de la société pour le remettre quelques jours plus tard. Peu à l'aise avec cette idée, j'ai partagé mon point de vue avec lui, expliquant que de telles pratiques bas de gamme étaient incompatibles avec nos ambitions pour ce projet, même si elles étaient légales. C'est là qu'il m'a sorti la phrase magique que tout escroc utilise pour vous manipuler : "Ne t'inquiète pas, fais-moi confiance."


Avant de poursuivre mon récit, il est important de savoir que ce n'était pas mon premier projet, et ce n'était pas non plus la première fois qu'un associé me demandait de lui faire confiance. La confiance entre associés est la base même d'un projet réussi, n'est-ce pas ?


Alors, comme à mon habitude, j'ai décidé de lui faire confiance et de le laisser faire cette manipulation. Et devinez quoi ? Il n'a jamais remis l'argent dans le compte de la société à ce jour. Pire encore, il a facturé des biens à notre entreprise et s'est fait payer sans jamais les livrer. Pendant des mois, je me suis acharné à récupérer l'argent qu'il avait pris, tandis qu'il ressortait sans cesse la même phrase manipulatrice : "Ne t'inquiète pas, fais-moi confiance."


Puis, un jour, j'en ai eu assez de courir après lui. J'ai décidé de lui donner un ultimatum : s'il ne remboursait pas l'argent, j'allais prendre des mesures radicales à son encontre. Il m'a répondu par un message bidon, prétendant être malade et avoir besoin de réfléchir. Ensuite, il a cessé de répondre à mes appels. À la fin de l'ultimatum, j'ai retiré tout l'argent restant sur les comptes de la société afin qu'il ne puisse pas s'en emparer, et j'ai convoqué une assemblée des associés pour le révoquer.


Comprenant que les soupçons se resserraient autour de lui, João a alors agi comme tout escroc qui se respecte en essayant de créer divers éléments en sa faveur :


Acte 1 : Il a appelé la police et les a fait venir le lendemain à la société pour me faire sortir de cette dernière, devant l'incompréhension totale des collaborateurs et des voisins. Chose qu'évidemment il n'avait pas le droit de faire étant donné que nous étions signataire à deux et que donc il ne pouvait agir de la sorte sans mon consentement.

Acte 2 : Il a déposé une plainte contre moi pour gestion déloyale, chose qu'il n'avait également pas le droit de faire sans mon consentement. Dans sa plainte, il affirmait même que j'avais l'intention de prendre l'argent et de créer une entreprise concurrente, alors même que j'avais convoqué une assemblée et informé tous les associés que je remetterais l'argent quelle que soit l'issue du vote de révocation de João de son poste de gérant. Bien évidemment, aucun autre associé n'a porté plainte contre moi. Et comme il ne pouvait pas faire cette plainte sans ma signature, il c'est porté partie civile (le ridicule ne tue pas).

Acte 3 : Il a licencié en masse toutes les personnes proches de moi qui travaillaient dans l'entreprise, chose qu'il n'avait également pas le droit de faire sans mon consentement.


Avec le recul, il me paraît évident que ces actions étaient simplement destinées à le protéger au cas où les choses iraient plus loin, comme le dépot d'une plainte pénale à son encontre. D'ailleurs jusqu'à la date de l'assemblé il a accouru auprès de toutes les personnes que nous connaissions (propriétaire des bureaux que nous louions, partenaires, employés, etc) pour les informer que j'ai volé la société. Je pense que fasse à la situation il a complètement paniqué et il a dû essayer de se rassurer en obtenant une quelconque validation de ses dires par qui voulait bien le croire ou du moins l'entendre.


Ainsi à mon arrivé sur les lieux, je me suis retrouvé escorté au poste de police pour une audition. Une fois sur place, les policiers m'ont conduit dans le bureau de la commissaire. Bien qu'elle ait été aimable, elle m'a informé avant le début de l'audition qu'elle n'avait pas encore pris connaissance du dossier, mais qu'il y avait de grandes chances que je passe tout le week-end en prison jusqu'à lundi afin qu'ils puissent récupérer l'argent de la société que j'avais en ma possession. A ce moment précis j'ai pensé à ma femme qui était alitée en raison d'une menace d'accouchement prématuré, et je n'avais personne pour m'occuper de ma fille de 3 ans. Je peux vous dire honnêtement que lorsque j'ai appris cela, j'ê me suis imaginé jeter João par la fenêtre du bureau où je me trouvais. Mais tout cela était avant qu'ils n'aient pris ma déposition. Car à la fin de celle-ci, la commissaire m'a demandé de ne surtout pas remettre l'argent sur les comptes de la société, j'imagine qu'elle avait certainement consulté le dossier noir de João pendant ce laps de temps. Elle m'a donc fait signer un document m'engageant à ne pas toucher l'argent jusqu'à l'assemblée qui allait avoir lieu 20 jours plus tard.


Le jour de l'assemblée, João a été immédiatement révoqué de son poste de gérant, et lors d'une autre assemblée quelques semaines plus tard, les associés ont voté en faveur de la poursuite judiciaire de la société contre lui.


No alt text provided for this image

Je vous rassure, j'ai été acquitté depuis, et la société se porte bien. Pendant plusieurs semaines, j'ai voulu partager cette expérience, mais c'est aujourd'hui, après avoir reçu l'acquittement, que je me suis dit qu'il fallait absolument que je partage cette histoire. Pourquoi ? Parce que j'aurais tellement aimé lire un article comme celui-ci avant de rencontrer João. Je pense aussi que j'ai besoin de faire le deuil de la relation que j'entretenais avec Joao (je l'avais trop vite hissé au seuil de frère). Enfin écrire m'aide simplement a tourner la page :)

Maintenant et pour conclure voici mes conseils :

  1. Le plus important, la confiance ne se mérite pas elle se gagne avec le temps (et il faut beaucoup de temps)
  2. Auditez toujours vos associés lorsque vous lancez un projet. En Suisse, vous pouvez commander un registre des poursuites pour seulement 18 CHF par personne.
  3. Demandez aux impôts de vous fournir la déclaration d'impôt de votre associé, c'est gratuit en Suisse.
  4. Utilisez des outils peu coûteux comme Moneyhouse pour identifier toutes les sociétés dans lesquelles vos associés possèdent des parts ou ont géré.
  5. Consultez ensuite le registre du commerce fédéral gratuit, Zefix, pour connaître les changements au registre, comme une faillite.
  6. Commandez les casiers judiciaires de vos associés, qui coûtent 40 CHF en Suisse.
  7. Méfiez-vous des personnes trop avares d'elles-mêmes. Un bon entrepreneur est souvent concentré et ne parle pas trop (bien qu'il y ait des exceptions, bien sûr).
  8. Documentez par écrit toutes les choses que vos associés souhaitent faire et avec lesquelles vous n'êtes pas d'accord ou qui vous dérangent.
  9. Rédigez toujours un pacte d'associé solide, même si vous travaillez sur un projet avec un membre de votre famille.
  10. Et enfin faites confiance à votre instinct il ne vous ment jamais

Suivez ces conseils et soyez vigilants dans vos associations pour éviter de vivre une expérience aussi désastreuse que la mienne avec João. La confiance est importante, mais la prudence l'est tout autant. Bonne chance dans vos projets futurs

Tamim Chaouki BENGUETTAT

Senior Manager in Tax & accounting

9 mois

Bravo Momo, j'ai eu une fois affaire avec ton partenaire, je peux te confirmer que c'est une personne stupide et pathétique en dépit de cela, il maîtrise parfaitement l'art et le sens de l'escroquerie tel que Hassen Chalghoumi maîtrise la langue de Molière.😂 😂 😂

Farouk Nouizi Ph.D

Assistant Researcher at University of California, Irvine - College of Medicine

9 mois

Merci d’avoir partager avec nous mon frère. On rencontrera tous sans doute un Joao dans notre vie. On aura certainement besoin de ces précieux conseils 👍

Oumaima Gafaiti Lamri

Transaction manager Metal Desk // Commodity Trade Finance (CTF)

9 mois

Quelle histoire!!! Courage Mohamed c’est derrière toi ☺️

Identifiez-vous pour afficher ou ajouter un commentaire